Tour Eiffel

A l’occasion de l’exposition universelle de 1889, la tour Eiffel était là pour démontrer le savoir-faire technologique français. A son inauguration, elle a accueilli plus de 236 millions de visiteurs. Elle est devenu l’emblème de Paris de part sa taille exceptionnelle et sa silhouette immédiatement reconnaissable.

Conçue par Maurice Koechlin et Émile Nouguier, respectivement chefs des bureaux des études et des méthodes d’Eiffel & Cie, la tour Eiffel est la principale attraction de l’Exposition de 1889. Le premier plan datant de juin 1884 a été repris par Stephen Sauvestre, l’architecte en chef des projets de l’entreprise, qui lui donna plus d’esthétique.

Construite en deux ans, deux mois et cinq jours, de 1887 à 1889, par 250 ouvriers, elle est officiellement inaugurée le 31 mars 1889. Sa fréquentation s’érode rapidement; la tour Eiffel ne connaîtra véritablement un succès massif et constant qu’à partir des années 1960, avec l’essor du tourisme international. Elle accueille maintenant plus de six millions de visiteurs chaque année.

Ses 300 mètres de hauteur lui ont permis de porter le titre de « plus haute structure du monde » jusqu’à la construction en 1930 du Chrysler Building, à New York. La tour Eiffel, construite sur le Champ-de-Mars, près de la Seine, dans le 7e arrondissement de Paris, est actuellement exploitée par la Société d’exploitation de la tour Eiffel (SETE). Le site, qui emploie 500 personnes (250 directement employés par la SETE et 250 par les différents concessionnaires installés sur le monument), est ouvert tous les jours de l’année.

La tour Eiffel est inscrite aux monuments historiques depuis le 24 juin 1964 et est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1991, en compagnie des autres monuments parisiens.

Imaginée en 1884, édifiée entre 1887 et 1889 et inaugurée pour l’exposition universelle de 1889 à Paris, la tour Eiffel symbolise de nos jours, un pays en entier, la France.

Pourtant, il n’en fut pas toujours ainsi. La tour Eiffel a d’abord fait partie de la vitrine économique du pays.

À partir de 1875, la Troisième République naissante, caractérisée par une instabilité politique chronique, peine à se pérenniser.

Au gouvernement, les équipes politiques se succèdent à un rythme soutenu. Selon Léon Gambetta, il est souvent composé de ministres « opportunistes », mais dont l’œuvre législatrice posa les pierres des principes encore en vigueur de nos jours : école obligatoire, laïcité, liberté de la presse, etc.

Mais la société de l’époque porte encore plus d’attention aux progrès techniques qu’elle ne croit au progrès social. C’est cette foi dans les bienfaits de la science qui a donné naissance aux expositions universelles. Mais dès la première exposition (Great Exhibition of the Works of Industry of All Nations, Londres, 1851), les gouvernants s’aperçoivent vite que derrière l’enjeu technologique se profile une vitrine politique, dont il serait dommage de ne pas profiter. En démontrant son savoir-faire industriel, le pays accueillant l’exposition signifie par là même son avance et sa supériorité sur les autres puissances européennes, qui régnaient alors sur le monde.

Dans cette optique, la France accueille à plusieurs reprises l’exposition universelle, comme en 1855, en 1867 et 1878. Jules Ferry, président du Conseil de 1883 à 1885, décide de relancer l’idée de la tenue d’une nouvelle exposition universelle en France. Le 8 novembre 1884, il signe un décret instituant officiellement la tenue d’une exposition universelle à Paris, du 5 mai au 31 octobre 1889. L’année choisie n’est pas innocente, puisqu’elle symbolise le centenaire de la Révolution française. Paris sera encore une fois au « centre » du monde. Quoique du côté du Nouveau Monde les choses évoluent vite et c’est de l’autre côté de l’Atlantique, au sein de la jeune puissance économique des États-Unis d’Amérique, que naîtra véritablement l’idée d’une tour de 300 mètres. En effet, lors de l’exposition universelle de Philadelphie en 1876, les ingénieurs américains Clark et Reeves, imaginent un projet de pylône cylindrique de 9 mètres de diamètre maintenu par des haubans métalliques, ancrés sur une base circulaire de 45 mètres de diamètre, d’une hauteur totale de 1 000 pieds (environ 300 mètres). Faute de crédits, leur projet ne verra jamais le jour, mais sera quand même publié en France dans la revue Nature.

Dans la même lignée, l’ingénieur français Sébillot puise, aux États-Unis, l’idée d’une « tour-soleil » en fer qui éclairerait Paris. Pour ce faire, il s’associe avec l’architecte Jules Bourdais, qui fut à l’origine du palais du Trocadéro pour l’exposition universelle de 1878. Ensemble, ils concevront un projet de « tour-phare » en granit, haute de 300 mètres qui connaîtra plusieurs versions, concurrencera le projet de tour de Gustave Eiffel, et qui finalement, ne sera jamais construit.

En juin 1884, deux ingénieurs des entreprises Eiffel, Maurice Koechlin et Émile Nouguier, respectivement chef du bureau d’études et chef du bureau des méthodes, se penchent à leur tour sur un projet de tour métallique de 300 mètres. Ils espèrent pouvoir en faire le clou de l’Exposition de 1889.

Le 6 juin, très exactement, Maurice Koechlin dessine le tout premier croquis de l’édifice. Le dessin représente un haut pylône de 300 mètres, où les quatre piles incurvées, se rejoignant au sommet, sont reliées par des plates-formes tous les 50 mètres. Gustave Eiffel voit cette esquisse, dit ne pas s’y intéresser, mais concède toutefois à ces concepteurs l’autorisation de poursuivre l’étude.

Stephen Sauvestre, architecte en chef des entreprises Eiffel est sollicité et redessine complètement le projet pour lui donner une autre envergure : il rajoute de lourds pieds en maçonnerie et consolide la tour jusqu’au premier étage par le truchement d’arcs, réduit le nombre de plates-formes de cinq à deux, surplombe la tour d’une « coiffe » la faisant ressembler à un phare, etc.

Cette nouvelle mouture du projet, agrémentée du vernis décoratif décrit ci-dessus, est à nouveau présentée à Gustave Eiffel qui, cette fois-ci, se montre enthousiasmé. À tel point qu’il dépose, le 18 septembre 1884, en son nom et ceux de Koechlin et Nouguier, un brevet « pour une disposition nouvelle permettant de construire des piles et des pylônes métalliques d’une hauteur pouvant dépasser 300 mètres ». Et bien vite, il rachètera les droits de Koechlin et Nouguier, pour détenir les droits exclusifs sur la future tour, qui par voie de conséquence, portera son nom.

Le génie de Gustave Eiffel ne réside donc pas dans la conception du monument, mais dans l’énergie qu’il a dépensée à faire connaître son projet auprès des gouvernants, des décideurs et du grand public, pour pouvoir construire la tour, et, une fois que cela fut fait, dans l’investissement pour en faire, aux yeux de tous, bien plus qu’un simple défi architectural et technique ou encore un objet purement esthétique (ou inesthétique selon certains). Il a aussi financé avec ses propres fonds quelques expériences scientifiques menées directement sur ou depuis la tour Eiffel, qui auront permis de la pérenniser.

Pour commencer, il va s’employer à convaincre Édouard Lockroy, le ministre de l’Industrie et du Commerce de l’époque, de lancer un concours ayant pour objet « d’étudier la possibilité d’élever sur le Champ-de-Mars une tour en fer à base carrée de 125 mètres de côté à la base et de 300 mètres de hauteur ». Les modalités de ce concours, qui eut lieu en mai 1886, ressemblent tellement au projet défendu par Gustave Eiffel qu’on pourrait presque croire qu’il fut écrit de sa propre main. Bien sûr, il n’en est rien, mais il est évident que son projet a de grandes chances d’être retenu pour figurer à l’Exposition universelle qui se tient trois ans plus tard. Encore faut-il convaincre que l’objet n’est pas purement un bâtiment d’agrément et qu’il peut remplir d’autres fonctions. En mettant en avant, et ce dès le début, l’intérêt scientifique qui peut être retiré de sa tour, l’ingénieur Eiffel marque indéniablement des points.

L’issue du concours n’est pourtant pas acquise d’avance à Eiffel. La concurrence est rude. 107 projets sont déposés. Gustave Eiffel gagnera finalement ce concours, l’autorisant à construire sa tour pour l’Exposition universelle de 1889, juste devant Jules Bourdais qui avait entre-temps, troqué le granit pour le fer.

Deux problèmes se posent alors : le système d’ascenseurs qui ne satisfait pas le jury du concours, obligeant Eiffel à changer de fournisseur, et l’emplacement du monument. Au début, il est envisagé de lui faire enjamber la Seine ou de le coller à l’Ancien Palais du Trocadéro devenu aujourd’hui le palais de Chaillot, avant finalement de décider de la placer directement sur le Champ-de-Mars, lieu de l’Exposition, et d’en faire une sorte de porte d’entrée monumentale.

L’emplacement, mais aussi les modalités de construction et d’exploitation font l’objet d’une convention signée le 8 janvier 1887 entre Édouard Lockroy, ministre du Commerce, agissant au nom de l’État français, Eugène Poubelle, préfet de la Seine, agissant ici au nom de la Ville de Paris et Gustave Eiffel, agissant en son nom propre et non pour son entreprise. Cet acte officiel précise notamment le coût prévisionnel de la construction, soit 6,5 millions de francs de l’époque, payés à hauteur de 1,5 million de francs par des subventions (article 7) et pour le reste par une société anonyme ayant pour objet spécifique l’exploitation de la tour Eiffel, créée par Gustave Eiffel et financée par l’ingénieur et un consortium de trois banques. L’écrit précise aussi le prix des entrées qui devra être pratiqué durant l’Exposition universelle (article 7), que 300 places par mois (au plus) devront être gratuites, que, à chaque étage, une salle spéciale, devra être réservée pour mener des expériences scientifiques et/ou militaires, restant gratuitement à disposition pour les personnes désignées par le Commissaire général (article 8) etc. Enfin, l’article 11 stipule que :

« Après l’Exposition et dès la remise du parc du Champ de Mars, la ville deviendra propriétaire de la tour, avec tous les avantages et charges afférents ; mais M. Eiffel, comme complément du prix des travaux, en conservera la jouissance jusqu’à l’expiration des vingt années qui compteront à compter du 1er janvier 1890, délai au bout duquel cette jouissance fera retour à la Ville de Paris. La remise de la tour sera faite après ces vingt années, en bon état d’usage et d’entretien, sans qu’il puisse être exigé de M. Eiffel de réfections spéciales. »

Initialement, Gustave Eiffel (ingénieur passé maître dans l’architecture du fer) avait prévu douze mois de travaux ; en réalité, il faudra compter le double. La phase de construction qui débutera le 28 janvier 1887, s’achèvera finalement en mars 1889, juste avant l’ouverture officielle de l’Exposition universelle.

Sur le chantier, le nombre d’ouvriers ne dépassera jamais les 250. C’est que, en fait, une grande partie du travail est fait en amont, dans les usines des entreprises Eiffel à Levallois-Perret. Ainsi, sur les 2 500 000 rivets que compte la tour, seulement 1 050 846 furent posés sur le chantier, soit 42 % du total. La plupart des éléments sont assemblés dans les ateliers de Levallois-Perret, au sol, par tronçons de cinq mètres, avec des boulons provisoires, et ce n’est qu’après, sur le chantier, qu’ils sont définitivement remplacés par des rivets posés à chaud.

La construction des pièces et leur assemblage ne sont pas le fruit du hasard. 50 ingénieurs exécutèrent pendant deux ans 5 300 dessins d’ensemble ou de détails, et chacune des 18 038 pièces en fer possédait son schéma descriptif.

Sur le chantier, dans un premier temps, les ouvriers s’attaquent à la maçonnerie en réalisant notamment d’énormes socles en béton soutenant les quatre piliers de l’édifice. Cela permet de réduire au minimum la pression au sol de l’ensemble qui n’exerce qu’une très faible poussée de 4,5 kg/cm2 au niveau de ses fondations.

Le montage de la partie métallique proprement dite commence le 1er juillet 1887. Les hommes chargés du montage de ce gigantesque Meccano sont nommés les voltigeurs. Ils sont dirigés par Jean Compagnon. Jusqu’à 30 mètres de hauteur, les pièces sont montées à l’aide de grues pivotantes fixées sur le chemin des ascenseurs. Entre 30 et 45 mètres de hauteur, 12 échafaudages en bois sont construits. Une fois passés les 45 mètres de hauteur, il fallut édifier de nouveaux échafaudages, adaptés aux poutres de 70 tonnes qui furent utilisées pour le premier étage. Est ensuite venue l’heure de la jonction de ces énormes poutres avec les quatre arêtes, au niveau du premier étage. Cette jonction a été réalisée sans encombre le 7 décembre 1887 et a rendu inutiles les échafaudages temporaires, remplacés dans un premier temps par la première plate-forme (57 mètres), puis, à partir d’août 1888, par la seconde plate-forme (115 mètres).

En septembre 1888, alors que le chantier est déjà bien avancé et le deuxième étage construit, les ouvriers se mettent en grève. Ils contestent les horaires de travail (9 heures en hiver et 12 heures l’été), ainsi que leur salaire considéré comme maigre eu égard aux risques pris. Gustave Eiffel argue du fait que le risque n’est pas différent qu’ils travaillent à 200 mètres d’altitude ou à 50, et bien que les ouvriers soient déjà mieux rémunérés que la moyenne de ce qui se pratiquait dans ce secteur à l’époque, il leur concède une augmentation de salaire, mais en refusant de l’indexer sur le facteur « risque variable selon la hauteur » (ce qui était demandé par les ouvriers). Trois mois plus tard, une nouvelle grève éclate, mais cette fois-ci, il tiendra tête et refusera toute négociation.

En mars 1889, le monument est achevé à temps et aucun accident mortel n’aura été déploré parmi les ouvriers (un ouvrier y trouvera toutefois la mort, mais c’était un dimanche, il ne travaillait pas et perdit l’équilibre lors d’une démonstration à sa fiancée). Il aura coûté 1,5 million de francs de plus que prévu, et aura pris le double de temps à être construit que ce qui était initialement prévu dans la convention de janvier 1887.

L’édifice achevé ou presque, il restait à prévoir un moyen pour que le public se rende à la troisième plate-forme. Les ascenseurs Backmann, qui étaient initialement prévus dans le projet présenté au concours de mai 1886, ayant été rejetés par le jury, Gustave Eiffel fait appel à trois nouveaux fournisseurs : Roux-Combaluzier et Lepape (devenus Schindler), la société américaine Otis et enfin Léon Edoux (qui a fait ses études dans la même promotion que Gustave Eiffel).

Le 6 mai 1889, l’Exposition universelle ouvre ses portes au public, qui peut grimper sur la tour Eiffel à partir du 15 mai. Alors qu’elle avait été décriée pendant sa construction, notamment en février 1887 par certains des artistes les plus célèbres de cette époque, elle connaît, pendant l’Exposition, un succès populaire immédiat, remportant l’adhésion des visiteurs. Dès la première semaine, alors que les ascenseurs ne sont même pas encore en service, ce sont 28 922 personnes qui grimpent à pied en haut de l’édifice. Au final, sur les 32 millions d’entrées comptabilisés pour l’Exposition, ce sont environ 2 millions de curieux qui s’y presseront.

Le monument, qui est alors le plus haut du monde (jusqu’en 1930 et l’édification du Chrysler Building à New York), attire aussi quelques personnalités, dont la plus connue ou en tout cas celle qui toucha le plus Gustave Eiffel, est son confrère américain Thomas Edison.

La tour Eiffel n’est pas le seul monument qui attire les foules, l’immense Galerie des machines (440 mètres de long pour 110 mètres de large) de Ferdinand Dutert et Victor Contamin ou encore le Dôme central de Joseph Bouvard impressionnent tout autant. Mais la véritable nouveauté consiste en la généralisation de l’électricité, qui permet des jeux de lumière de toute beauté.

Mais, une fois l’Exposition finie, la curiosité retombe vite et le nombre de visiteurs avec. En 1899, seules 149 580 entrées sont comptabilisées. Afin de relancer l’exploitation commerciale de sa tour, Gustave Eiffel baisse le prix des billets d’entrée, sans que l’impact n’en soit significatif pour autant. Il faudra attendre l’Exposition universelle de 1900, une nouvelle fois ayant lieu à Paris, pour que remonte le nombre de curieux. À cette occasion, plus d’un million de tickets seront vendus, ce qui est largement supérieur aux dix années précédentes, mais bien inférieur à ce qui aurait pu être permis. En effet, non seulement les entrées sont deux fois moins nombreuses qu’en 1889, mais, en part absolue, la baisse est encore plus forte, compte tenu du fait que les visiteurs de l’Exposition universelle de 1900 étaient encore plus nombreux qu’en 1889.

La chute du nombre d’entrées reprend dès 1901, de sorte que l’avenir de la tour n’est pas assuré passé le 31 décembre 1909, fin de la concession d’origine. Certains avancent même l’idée qu’elle puisse être détruite.

Conscient de ce danger, Gustave Eiffel, qui avait, dès le départ, imaginé que la tour puisse servir d’un point de vue scientifique, multiplie les expériences menées depuis le monument. L’ingénieur définitivement retiré des affaires depuis 1893, suite à son implication dans le scandale de Panamá, finance même une partie de ces expériences.

En 1889, Éleuthère Mascart, le (premier) directeur du Bureau central météorologique de France créé en 1878 (ancêtre de Météo France), fait installer, avec l’autorisation de Gustave Eiffel, une petite station d’observation en haut de la tour Eiffel. En octobre 1898, Eugène Ducretet établit la première liaison téléphonique hertzienne entre la tour Eiffel et le Panthéon de Paris, distant de 4 kilomètres. En 1903, le capitaine Gustave Ferrié, militaire de son état, cherche à établir un réseau télégraphique sans fil, sans le financement de l’Armée qui ne le soutient pas dans la mesure où elle privilégie à cette époque les signaux optiques et les pigeons voyageurs, jugés plus fiables. Malgré ce contexte et alors que la TSF n’en est qu’à ses balbutiements, Gustave Eiffel soutient à ses frais le projet du capitaine en acceptant qu’il installe une antenne au sommet de sa tour. L’expérience se révélera un succès et on sait maintenant à quel point il s’agissait d’une technologie d’avenir. En 1909, une petite soufflerie est construite au pied de la tour Eiffel, qui sera remplacée dès 1912 par une soufflerie beaucoup plus vaste, installée cette fois-ci rue Boileau, dans le XVIe arrondissement. Le réseau de TSF à usage strictement militaire dont fait partie l’émetteur de la tour Eiffel va basculer vers un usage civil à partir des années 1920. À partir de 1921, des programmes radio sont régulièrement diffusés depuis la tour Eiffel et Radio Tour Eiffel, bien connue des Parisiens, sera officiellement inaugurée le 6 février 1922. En 1925, la tour Eiffel sert de cadre aux débuts de la télévision en France. La technique s’améliore et des émissions encore expérimentales sont proposées entre 1935 et 1939. À la Libération l’émetteur Telefunken du Fernsehsender Paris est utilisé pour les premières émissions en 441 lignes. Après son incendie il sera remplacé par un émetteur 819 lignes en service jusqu’à l’arrêt des émissions en noir et blanc de TF1. La télévision se répand ensuite dans les foyers, d’abord en noir et blanc, puis en couleur. En 1959, l’installation d’un nouveau mât de télédiffusion fait culminer la tour Eiffel à 320,75 mètres et arrose 10 millions de personnes. Enfin, en 2005, un émetteur pour la télévision numérique terrestre est installé.

La tour Eiffel a donc bien un potentiel scientifique qui mérite d’être exploité, ce dont se rendent compte les autorités, qui décident donc, en 1910, de prolonger la concession et l’exploitation pour soixante-dix années supplémentaires. La tour apparaît d’autant plus utile qu’il s’agit du point le plus élevé de la région parisienne et que son émetteur de TSF aura été stratégique pendant la Première Guerre mondiale. Grâce à la tour Eiffel, plusieurs messages décisifs seront captés dont le « radiogramme de la victoire », qui permettra de déjouer l’attaque allemande sur la Marne, ou encore ceux qui permettront d’arrêter Mata Hari.

La société d’exploitation change et la tour subit un sérieux lifting à l’occasion de l’Exposition spécialisée de 1937 : les décorations démodées du premier étage sont enlevées et un nouvel éclairage est installé.

La tour est réquisitionnée par la Wehrmacht pour communiquer avec les troupes. Elle y installe également le seul émetteur de télévision fonctionnant en Europe pendant la guerre, le Fernsehsender Paris. Les émissions, en grande partie en français, étaient destinées aux militaires allemands blessés se trouvant dans les hôpitaux de la région. Les Allemands placent un faisceau lumineux dans la tour pour guider les avions, dans la nuit. Après avoir échappé à la destruction prévue par Hitler en 1944, elle passe, à la libération, sous contrôle allié et les Américains y installent un radar.

À partir des années 1960, le tourisme international de masse commence à se développer, ce qui a des conséquences directes sur le nombre de visiteurs de la tour, qui monte en flèche pour atteindre progressivement le cap des 6 millions d’entrées annuelles (cap passé pour la première fois en 1998), obligeant à une rénovation. S’étalant jusqu’en 1985, le chantier s’articule autour de trois axes :

* l’allégement de la structure de l’édifice ;
* la reconstruction totale des ascenseurs et escaliers ;
* la création de moyens de sécurité adaptés au succès populaire de la tour.

Ainsi, la tour Eiffel sera allégée de 1 340 tonnes superflues, sera repeinte et traitée contre la corrosion, verra les ascenseurs de la troisième plate-forme remplacés, l’ouverture du restaurant gastronomique Le Jules-Verne ou encore la mise en place d’un dispositif d’éclairage composé de 352 projecteurs au sodium. Les noms de savants du premier étage seront remis en valeur par de la dorure, comme à l’origine.

Depuis les années 1970, la tour Eiffel a encore gagné en popularité et est devenue dans l’esprit collectif mondial, un des plus puissants symboles de la France.

Le 26 décembre 1978, Thierry Sabine lance le premier Paris-Dakar du Trocadéro, au pied de la tour Eiffel. Plusieurs concerts géants y ont lieu : Jean-Michel Jarre en 1995 ; Johnny Hallyday en 2000 et en 2009. Enfin, un grand nombre de films, notamment américains, exploitent l’inconscient collectif pour représenter en un seul plan, une seule séquence, Paris ou la France.

En 2002, le cap des 200 millions d’entrées cumulées est dépassé et en 2004, elle est le 5e monument le plus visité d’Île-de-France.

Le 1er janvier 2006, s’ouvre une nouvelle période d’exploitation de dix ans, le concessionnaire étant la société d’économie mixte SETE (Société d’exploitation de la tour Eiffel), dont le capital est détenu à 60 % par la Ville de Paris.


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